Frapper monnaie, acte 2

Après notre première séance d’exploration de l’histoire de la monnaie à Marseille le 18 avril après midi au Cabinet des Monnaies et Médailles avec Sylvain BORZILLO, le Conservateur du Cabinet des monnaies et médailles, ce lundi 15 mai nous nous sommes à nouveau retrouvés à l’AKDemia du Tango pour construire ensemble notre balade patrimoniale sur frapper monnaie à Marseille.

Nous nous sommes retrouvés Michel, Christelle et Lætitia de l’association La Roue Marseillaise, Samanta, Agnès et Prosper de la coopérative Hôtel du Nord et Marion du GLAP (Du Gymnase à Longchamp – Arts et Patrimoine). Nous avons partagé les résultats de nos recherches sur les personnages, les lieux et les histoires qui racontent les monnaies de Marseille.

A partir de là nous avons fixé une date mi octobre, dessiné le tracé d’une future balade, identifié des lieux, des récits et des personnes pour raconter l’enjeu d’une monnaie locale complémentaire aujourd’hui à Marseille au regard de ce que nous raconte l’histoire de la monnaie : Pourquoi une nouvelle « monnaie » à Marseille ? Pour quelles raisons est-ce une monnaie « locale » ? Et de quoi cette monnaie est-elle « complémentaire » ? D’ailleurs, pour quelles raisons Marseille a-t-elle frappée monnaie pendant 2500 ans? Puis des monnaies de nécessité il y a à peine cent ans?

Nous avons fait des détours par l’histoire du trueque en Argentine, des monnaies parallèles impulsées par des militants écologistes en 1995 et qui ont connu leur heure de gloire au plus fort de la crise argentine entre 2000 et 2002 avec plus de deux millions d’utilisateurs pour finir par l’engagement des mairies de secteur à Marseille pour soutenir la monnaie locale complémentaire la Roue.

Communiqué : Moins de Locations de Courte Durée pour Plus d’Habitant.es à l’année !

Nous, Citoyens, associations, organismes, collectifs à travers la France qui œuvrons en partie ou en totalité pour la réduction des Locations de Courte Durée ( L.C.D ), souhaitons ensemble alerter sur cette activité aux impacts négatifs sur nos territoires et lieux de vie, en particulier sur le logement .

Le développement exponentiel des L.C.D a révélé, accentué, accéléré la difficulté désormais pour une majorité de personnes de conserver ou trouver un logement dans la commune où ils souhaitent vivre et dans un lieu d’habitation adapté a leurs besoins .

L’hospitalité qui prévalait dans nos quartiers de celles et ceux qui vivent, travaillent et séjournent se dégrade, l’urgence du logement pour toutes et tous émerge avec plus d’acuité.

Faute d’une offre suffisante et du fait d’une augmentation sans commune mesure du prix des loyers et à l’achat, cette crise du logement ne concerne plus seulement les personnes en situation de précarité et les classes populaires…mais touche désormais aussi la classe moyenne !  

Face à cela, différentes collectivités territoriales soutenues ou incitées par des citoyen.nes, associations, collectifs… ont mis en place ou tentent de le faire, différentes mesures pour réduire la concentration trop importante de L.C.D sur leurs territoires en particulier dans les zones touristiques.

En effet en attendant d’autres actions pour tenter de résoudre cette crise ( freiner voir arrêter l’augmentation régulière du nombre de résidences secondaires, diminuer les logements vacants …), les municipalités ou intercommunalités ont compris qu’agir en priorité dans ce domaine spécifique des L.C.D pouvait être un levier très rapide pour accueillir à court terme des habitant.es et remettre sur le marché du logement locatif permanent.

A titre d’exemple, Saint-Malo estime que l’application de son règlement municipal réduisant à moins de 2 000 le nombre de L.C.D, permettra de dégager une capacité d’accueil de 1 000 à 1 500 nouveaux habitant.es…et donc d’avoir plus de « volets ouverts » à l’année 🙂

Tout ceci sans dépenses financières et constructions nouvelles risquant de détruire des maisons dans les quartiers anciens ou résidentiels, sans disparition de terres agricoles ou espaces naturels … et ce dans un temps record (2 / 3 ans ) qu’aucun programme de constructions ne pourrait tenir ou permettre !

Si des collectivités territoriales diverses géographiquement et politiquement  ont réussi à trouver « des outils » les plus efficients possibles pour agir concrètement,

certains éléments juridiques, fiscaux…manquent afin que toutes les communes en France puissent de manière la plus facile et simple possible, agir efficacement.  


Ces éléments manquants à proposer et faire voter sont du ressort du législateur et du pouvoir exécutif, des parlementaires  et du gouvernement.

Or, il se trouve que dans les jours, semaines qui viennent, ces acteurs de la vie démocratique vont préciser, s’exprimer, devoir voter sur des propositions visant notamment à encadrer / réguler l’activité économique commerciale de Location de Courte Durée .

A cette occasion et en complément de propositions notamment issues des acteurs historiques qui œuvrent avec force depuis des années sur la résolution de cette crise du logement, nous  souhaitons leur soumettre 3 propositions prioritaires parmi celles que nous avons élaborées ou qui sont en réflexion en notre sein  afin d’atteindre l’objectif de réduire le trop plein de L.C.D dans les territoires en « Tension Logement pour des Habitant.es à l’Année » .

Elles sont les suivantes : 

1. Accorder à toutes collectivités territoriales sans critères d’importance  de la population ou nécessité d’être déclarées en zone tendue, de mettre en place toutes mesures utiles pour  atteindre cet objectif,

2. Inverser la fiscalité immobilière pour favoriser les loueurs à l’année de résidences principales plutôt que des loueurs de courte durée en résidences secondaires,

3. Déterminer un  » interlocuteur « précis  (Services de l’Etat, Conseil Régional…) susceptible d’assurer une mission la plus impartiale possible de centralisation,  de collecte et de transmission d’informations, de données de tous ordres… (y compris transparence des données des plateformes de location en ligne) et d’accompagnement, d’ingénierie auprès de tous les acteurs liés à ce thème.

Nous nous tenons à disposition de toutes et de tous  pour échanger, écouter et être entendus sur ces propositions et d’autres bien sûr que nous portons.

Nous invitons aussi celles et ceux qui partagent notre objectif, notre démarche  à nous rejoindre !

Contacts Information  :  Franck Rolland  06 85 27 16 10  et Hans Gervais     06 07 60 41 01 

Parmi les premiers signataires : 

Veronique Deschamps – Saint-Malo / Bretagne – Collectif Saint-Malo J’y vis…J’y reste !

Prosper Warner – Marseille / Provence Alpes Côté d’Azur – SCIC Hôtel du Nord / SCIC Les Oiseaux de passage 

Delphine Le Mee Bonet- Collectif  T.U.T – Lorient / Bretagne 

Jean Paul Lebas – Nouvelle Aquitaine – Association pour la Sauvegarde de la Presqu’île de Lège Cap Ferret 

Roxanne Berget – Pays de Loire – Ile d’Yeu – Les Enfants de Tempête

Laurent Bougras – Nouvelle Aquitaine – La Rochelle 

Isabelle Ange – Granville – Normandie 

Vincent Aulnay – Paris – Ile de France – ParisvsBnB 

Brigitte Cottet et Jean-Luc Poulet– Auvergne Rhône Alpes – Annecy – Association des résidents de la Vieille Ville d’Annecy

Marjolaine de Sinety – Bretagne – Ile de Batz – Collectif On parle de Toit

Céline Roger – Bretagne – Ile de Houat – Collectif L’ardois Salée

Hervé de Souich – Bretagne – Carnac – Les volets ouverts 56

Laetitia Visse – Normandie – Dieppe

Isabelle Ange – Normandie – Granville

Marie-Hélène Chastanet et Gabriel Grellier – Nouvelle Aquitaine – Ile de Ré – Volets Ouverts 17

Malika Peyraut – Nouvelle Aquitaine – CA Pays Basque – ALDA

Tamara – Occitanie – Saint-Martin de Lansuscle – Association La Logeuse

Caroline Laurent – Nouvelle Aquitaine – Ile d’Oleron – Collectif A l’Année sur Oleron

Guy Largier – Bretagne – Ile de Groix – Association Le Graho

En balade pour Frapper monnaie à Marseille

Le 18 avril après midi nous sommes retrouvés Michel, Christelle et Lætitia de l’association La Roue Marseillaise qui gère la monnaie local complémentaire avec Samanta, Agnès et Prosper de la coopérative Hôtel du Nord pour une visite commentée du Cabinet des Monnaies et Médailles avec Sylvain BORZILLO, le Conservateur du Cabinet des monnaies et médailles.

Notre ambition est de se réapproprier la monnaie à travers son histoire, particulièrement riche à Marseille qui fut la première à frapper monnaie il y a 2500 ans, la monnaie massalia, cent ans à peine après sa création et trois cents ans avant Rome. Depuis elle n’a cessé de frapper monnaie et, si le dernier Atelier de la monnaie situé rue Tapis Vert a fermé en 1857, la chambre de Commerce a continué au 19ème à emmètre une monnaie de nécessité pour soutenir le commerce local.

Aujourd’hui, Marseille continue à emmètre une monnaie local complémentaire pour favoriser les circuits courts et l’engament social et écologique des consommateurs, producteurs et commerçants. Aujourd’hui en version numérique, la Roue est accepté par plus de 300 professionnels à Marseille et est utilisable à l’échelle régionale.

Billet de 13 Roues

Comme le rappelle le plus ancien atelier de monnaie de Marseille retrouvé lors des fouilles archéologiques Place Villeneuve-Bargemon à côté de la Mairie, Frapper monnaie a toujours été une question de souveraineté, d’identité, de pouvoir et d’autonomie.

A travers cette histoire qui passe par le musée d’Histoire de Marseille, le Cabinet des monnaies, le musée d’Archéologie à la Vielle Charité, la Place Villeuneuve-Bargemon, le Palais de la Bourse, c’est l’occasion de partager et redéfinir ensemble l’enjeu de frapper monnaie et de comprendre ce que pourrait apporter une gestion décentralisée, citoyenne, éthique et écologique de la monnaie.

Des pistes ont émergées lors de cette visite et le travail d’enquête se poursuit. Ils nous restent à retrouver les traces dans les archives et les bâtiments des anciens Ateliers de la monnaie. Nous cherchons aussi à comprendre la place qu’ont joué les Grands Hôtels dans l’émission d’une monnaie de nécessité au 19ième. Notre objectif est de proposer une première balade à la rentrée de septembre. Bienvenue.

Des ordres touristiques

Texte de présentation de la thèse « Tourisme social, économie collaborative et droits culturels : ethnographie d’une coopération complexe » en Doctorat Lettres et Sciences Humaines, label Européen, soutenue le 30 novembre 2022 à l’Université de Nanterre par Prosper Wanner, salarié doctorant au sein de la SCIC Les oiseaux de passage, sous la direction de la sociologue Saskia Cousin.

Madame la Présidente, Mesdames et Messieurs les membres du jury, Merci tout d’abord pour l’attention que vous avez porté à ma recherche et pour votre présence ce matin. Merci à ma directrice de thèse, à mon comité de thèse, aux collègues universitaires et à mon tuteur qui m’ont accompagné, aux hôtes et aux professionnels du tourisme qui m’ont accordé du temps, aux contribuables qui ont financé ma thèse et à mes proches qui m’ont soutenu. La thèse que j’ai le plaisir de soutenir aujourd’hui devant vous a été réalisée dans le cadre d’une convention industrielle de formation par la recherche au sein de la coopérative Les oiseaux de passage et sous la direction de Saskia Cousin à l’université de Paris Nanterre. Son titre « Tourisme social, économie collaborative et droits culturels : ethnographie d’une coopération complexe » résume à lui seul l’objet initial de cette thèse : observer, documenter et analyser le développement d’une plateforme internet d’hospitalité Les oiseaux de passage par des personnes promouvant le tourisme social et les droits culturels. Avec le recul, l’objet central de cette thèse pourrait se résumer à savoir si les cadrages du dispositif touristique n’amèneraient pas à ignorer la part de poésie d’une relation d’hospitalité, c’est à dire sa part incalculable, sensible, humaine, singulière et imprévisible. Mon hypothèse est que le dispositif touristique ignore de plus en plus cette part incalculable parce qu’il s’inscrit dans un ordre du monde où la liberté de circulation est indexée sur la capacité à consommer des personnes.

Je m’intéresse au dispositif touristique depuis 2009, lorsqu’avec des personnes des quartiers nord de Marseille nous avons décidé de proposer l’hospitalité marchande chez l’habitant aux personnes de passage. A priori, cela paraissait simple. Pour ouvrir une chambre d’hôte, il suffisait d’une simple déclaration en mairie et de s’inscrire sur une plateforme touristique pour accueillir chez soi des personnes de passage et générer de l’économie. Ces deux conditions se sont avérées bien insuffisantes. Dans les faits, pour exercer cette activité et espérer en tirer un revenu, il faut noter ses hôtes et se faire noter, collecter la taxe de séjour, conserver les fiches de police six mois, confirmer des réservations sans pouvoir dialoguer au préalable, pratiquer une tarification dynamique, s’équiper sans cesse, verser des commissions à des intermédiaires, se conformer aux standards du confort touristique et accepter d’être en compétition avec les autres personnes du quartier qui accueillent.  Pour garder une part de poésie dans cette relation d’hospitalité, c’est à dire d’humanité et de singulier, il nous a fallu ruser, faire jurisprudence, se résigner, se tenir à l’écart et inventer sans cesse. Je le raconte dans cette thèse et c’est ce qui m’a amené à chercher à comprendre l’écart entre les discours sur le tourisme et ses conditions d’exercice. Et ce alors que les discours institutionnels sur le tourisme portés depuis plus de cinquante ans au niveau des Nations Unies vantent le tourisme comme un facteur d’humanité, de dialogue interculturel et de paix.

Les oiseaux de passage est une plateforme numérique qui permet à des personnes sur un même lieu de partager leurs hospitalités et leurs récits. Ce sont à titre d’exemple des accueils paysans, des auberges de jeunesse, des territoires en transition, des parcs naturels régionaux et des associations d’écotourisme. Le premier design de la plateforme Les oiseaux de passage s’ouvrait sur un poème de Pablo Neruda dont les lettres arrivaient comme des oiseaux puis s’envolaient en nuées. Le slogan était « d’humain à humains », pour affirmer la part d’humanité du voyage, loin du C to C, de consommateur à consommateur. Le projet convergeait plutôt bien avec les discours et valeurs de l’organisation mondiale du tourisme. Deux ans après, en 2019, pour la première version mise en ligne, la poésie volante avait disparu et plus d’un million de lignes de code servaient à calculer, cadrer et automatiser la mise en relation des personnes de passage avec celles qui accueillent. Au fur et à mesure des développements, les modes de calcul de la plateforme se sont alignés sur ceux du dispositif touristique pour être interopérables avec ses moteurs de recherche, ses systèmes de paiement et notation, ses standards, ses gestionnaires de réservation et ses comparateurs. J’ai pu observer et participer à ce passage d’une intention dite « d’humain à humains » vers sa traduction en un outil de calcul numérique où la poésie avait disparu. J’en ai été pleinement partie prenante.

Le sujet de ma thèse est d’analyser ce que le dispositif touristique fait et fait faire, c’est à dire ses algorithmes, ses logiques tarifaires, ses standards, sa fiscalité, sa législation, ses discours et l’ensemble des techniques d’intermédiation touristiques qui interviennent une relation touristique. Contrairement aux travaux universitaires existants en sciences humaines, je ne me suis pas intéressé au tourisme comme un art de voyager, une pratique culturelle, une industrie ou un loisir, mais comme le dispositif qui permet leur exercice. J’ai pu constater comme d’autres chercheurs avant moi le peu de porosité entre les travaux en sciences humaines qui s’intéressent à l’hospitalité, l’accueil du chez soi, et celles en sciences de gestion qui s’intéressent à l’hospitality, terme anglais qui désigne le secteur touristique.

Pour analyser ce dispositif touristique, je me suis appuyé sur la sociologie des agencements marchands de Michel Callon. Il propose d’analyser comment des personnes s’agencent entre elles, et avec quels outils de calcul, pour faire aboutir collectivement une transaction marchande. Par exemple, comment calculent et agissent collectivement sur une même destination un office du tourisme, un hôtelier, une plateforme de réservation en ligne et un aéroport, alors qu’ils ont des intérêts différents, parfois conflictuels. Il s’agit d’analyser comment des personnes différentes, qui ne se connaissent pas forcément, agissent collectivement, chacun y trouvant son compte. Michel Callon propose d’analyser les agencements marchands à travers cinq cadrages interdépendants qui sont, de manière très synthétique, la transformation d’une offre en marchandise, sa qualification, l’organisation de sa rencontre puis de son attachement avec un acquéreur pour conclure sur la fixation du tarif. Plusieurs de ses exemples en sociologie des agencements marchands sont empruntés au dispositif touristique. Michel Callon invite à analyser les cinq cadrages, notamment lorsque qu’ils débordent du cadre et que leurs modes de calculs sont recadrés. Pour cela il propose de suivre les entités depuis leur conception jusqu’à leur vente. J’ai réalisé plusieurs biographies d’activités devenues touristiques comme le menu touristique, le mini train, les visites guidées. J’ai observé puis fait la biographie d’un clapier de ferme qui va devenir un gîte touristique et dont la qualification puis sa commercialisation et son exploitation vont nécessiter des transformations physiques, juridiques, fiscales et commerciales. Ces cadrages successifs vont susciter des débordements révélateurs de ce que fait et fait faire le dispositif touristique aux personnes qui accueillent, parfois avec une certaine violence.

J’ai ajouté à cette grille d’analyse l’approche pharmacologique des techniques proposées par Bernard Stiegler. Il considère qu’une technique peut être à la fois un poison et un remède, ce qui est particulièrement vrai pour le tourisme, mais aussi et surtout qu’un un bouc-émissaire peut être parfois désigné quand la technique est mal gérée. J’ai pu le constater et l’analyser dans le cas du tourisme de masse à Venise. J’ai complété cette grille d’observation par l’approche des agencements polyphoniques proposés par Anna Tsing. Ces agencements arrivent lorsque des personnes s’agencent non pas de manières calculées, mais imprévisibles avec d’autres personnes hors cadre, dans ce qu’elle appelle un événement. J’ai pu observer que ces événements étaient parfois inhérents aux modes d’hospitalité présents sur Les oiseaux de passage comme à Hôtel du Nord. À travers ces grilles d’analyse, je me suis intéressé à ce que le dispositif touristique fait et fait faire aux personnes, aux intérêts spécifiques de chacune des personnes – intermédiaires, professionnels, institutions et touristes – et aux cadrages qu’ils instaurent entre eux pour agir collectivement et répondre aux débordements. Le code du tourisme, par exemple, répond à la fois au souci du touriste de voyager confortablement grâce au système de classement, au souci d’une collectivité de pouvoir financer son marketing territorial en instaurant une taxe de séjour, au souci d’un hôtelier d’augmenter sa rentabilité via sa montée en gamme et au souci d’un intermédiaire d’avoir l’exclusivité de la relation grâce à son immatriculation comme agence de voyage.Pour analyser les cinq cadrages et leurs modes de calcul, je me suis appuyé sur les travaux de l’anthropologue Jeanne Guyer sur la manière dont on nomme les choses, puis on les ordonne pour enfin les calculer. Par exemple, un hébergement est nommé comme touristique à partir de l’analyse de 240 critères de confort permettant de lui attribuer un score sur 700 points et un nombre d’étoiles. In fine c’est son niveau de confort moderne qui permet de qualifier et nommer un hébergement comme touristique, loin des discours humaniste de l’Organisation mondiale du tourisme. Je me suis particulièrement intéressé à ce que ces modes de calcul prennent en compte comme données, aux données qu’ils choisissent d’externaliser comme par exemple les conditions de travail, aux données qu’ils négligent parce qu’elles sont incalculables comme les données dites sensibles et enfin aux données qu’ils ignorent de par leur caractère imprévisible.

La construction d’une plateforme numérique de voyage a été particulièrement instructive sur l’usage des données. Une centaine de communautés d’hospitalité ont fait remonter du terrain leurs pratiques d’hospitalité et leurs données. J’ai pu compléter ces observations au sein de la coopérative Les oiseaux de passage par d’autres observations participatives dans trois autres milieux professionnels où je suis impliqué par ailleurs. Le premier à Marseille, où j’accompagne depuis douze ans en qualité de gérant d’Hôtel du Nord des hébergeurs, des producteurs, des artistes et des guides urbains dans la commercialisation de leur activité dans le cadre du dispositif touristique. J’ai proposé le concept de « communauté d’hospitalité » pour nommer cette organisation collective et démocratique de l’hospitalité qui peut être à la fois marchande, non marchande et non monétaire. Par exemple avec un hôte qui accueille chez lui, une autre personne qui accompagne à la visite du quartier et une troisième qui propose une carte sensible du quartier. Ensuite à Venise, où j’ai travaillé pour la ville et habité, je documente en particulier depuis 2018 l’instauration d’une taxe d’entrée dans la ville qui suscite de nombreux débats et questionnements tant pratiques que politiques. J’ai pu observer sur place les cent premiers jours du confinement et l’arrêt complet du dispositif touristique. Venise me permet d’observer plus particulièrement le point de vue institutionnel. Enfin à l’échelle européenne, j’anime depuis 2013 pour le Conseil de l’Europe le réseau de la Convention de Faro qui réunit une trentaine d’initiatives sur le droit au patrimoine culturel. Plus de la moitié de ces initiatives ont à faire avec le dispositif touristique, de manière subie ou désirée. Je peux observer ce que le dispositif touristique suscite comme débordements et recadrages dans des contextes très différents au sein des 47 États membres.

J’ai pu ainsi multiplier les contextes d’observation et les postures d’observation participative, comme gérant, consultant, militant et habitant. J’ai complété ces observations par des lectures scientifiques et des recherches dans les archives d’acteurs du tourisme, en particulier celles du Touring-club de France, cet acteur majeur dans la construction du dispositif touristique. J’ai choisi d’observer le tourisme dit industriel en suivant des formations en location courte durée et en suivant un couple de gestionnaires d’une quinzaine d’appartements touristiques à Venise. Je suis devenu Genius plus niveau deux sur la plateforme Booking.com et niveau Platinium chez Air France. J’ai complété ces observations participatives par des entretiens ciblés avec des professionnels du tourisme comme l’ancien responsable des statistiques au ministère du tourisme et des consultants en tourisme. J’ai élargi mes observations et analyses à des organisations d’hospitalité non touristiques comme les foyers de jeunes travailleurs et les associations d’aide aux réfugiés. Pour mener à bien mon analyse j’ai proposé cinq nouveaux concepts sur lesquels je vais revenir : la chambre blanche, l’homo turisticus, l’interface, la communauté d’hospitalité et l’ordre touristique.

Mon premier constat porte sur le cadrage de l’accueil touristique, c’est à dire des hébergements, activités, menus et transports qualifiés de touristiques. J’ai pu observer que le dispositif touristique ignore ce qu’ils proposent de commun, de contributif, de sobre, de mixité et de promiscuité avec le vivant. Ces données sont ignorées. A contrario, ce qui compte et est compté par le dispositif touristique est le confort moderne, c’est à dire le privatif, le serviable, l’hygiénique et l’équipement moderne. J’ai proposé le concept de chambre blanche pour symboliser ce cadrage central au dispositif touristique. La chambre blanche a été exposée pour la première fois en 1900 à l’exposition universelle par le Touring-club de France comme le modèle de ce que devait être l’accueil touristique. Elle est aujourd’hui présente dans l’ensemble du dispositif touristique que ce soit par exemple dans les 240 critères d’Atout France pour classer les hébergements touristiques ou les 100 items de Booking.com pour trier les offres. Il suffit d’ouvrir un site de réservation touristique pour voir l’omniprésence de la chambre blanche. Ce modèle centenaire est néanmoins de plus en plus source de préoccupation au niveau écologique et social avec la montée en gamme continue qu’il fait faire.

Le second constat porte sur les nombreuses personnes de passage qu’accueillent les personnes présentes sur Les oiseaux de passage et qui ne comptent pas comme touristes. Ce sont les travailleurs saisonniers, les stagiaires, les aidants, les mises à l’abri, les étudiants ou encore les accueils non monétaires. Ils ne sont pas pris en compte par le dispositif touristique au double sens du terme et relèvent parfois d’autres dispositifs d’accueil. La catégorie touriste a été adoptée pour la première fois au niveau statistique après la crise de 1929 puis à l’échelle internationale par l’ONU en 1963. Cette définition a été reprise ensuite pour les visas, les comptes satellites du tourisme, le ciblage marketing, le code du tourisme, les algorithmes prescriptifs et les logiques tarifaires. J’ai proposé le concept d’homo turisticus afin de désigner cette personne de passage bénéficiaire du dispositif touristique, celle qui est accueillie, ciblée, taxée, assurée, profilée et comptée dans le cadre du dispositif touristique. C’est aussi celle qui est désirée, attendue et accueillie confortablement. Je pose l’hypothèse que l’une des spécificités du dispositif touristique est d’avoir créé une nouvelle catégorie statistique, fiscale, légale, algorithmique et commerciale de voyageurs, basée sur sa capacité à consommer, c’est à dire son panier moyen. Ce cadrage lui aussi centenaire, est source de préoccupation sociale et économique, avec la montée de l’anti tourisme face aux difficultés d’accès au logement des habitants comme des autres voyageurs.

Le troisième constat porte sur les intermédiaires touristiques qui mettent en relation des personnes de passage et celles qui accueillent, notamment via internet. Une part importante des données concernant les personnes présentes sur Les oiseaux de passage ne sont pas prises en compte par ces intermédiaires. L’informatisation du tourisme a été réalisée avec succès dès l’après guerre par les compagnies aériennes pour créer des systèmes de réservation centralisée, des systèmes de distribution globalisée et gérer leurs fichiers clients. Ce qui fait dire à des universitaires que le tourisme a été le porte-drapeau de l’économie numérique. De manière générale, 80% des données numériques ne sont pas calculées par les algorithmes car elles sont dites non structurées. En tourisme, seules sont retenues les données qui servent aux comparateurs. Une offre touristique est calculée, triée, classée, qualifiée et prescrite par rapport à sa note de confort, sa géolocalisation et son tarif. Les données ignorées sont celles qui permettent de se singulariser et de se raconter. L’extrait d’un livre d’or, le dessin d’un lieu, un remerciement manuscrit, la voix d’un hôte, une langue locale ou une création artistique n’ont pas la place dans un comparateur car elles empêchent le calcul et rendent singulière chacune des offres d’hospitalité. J’ai proposé le concept d’interface pour nommer ces intermédiaires qui au delà de la gestion de la relation ont aussi un rôle de régulation et de traduction. Cette intermédiation touristique n’est pas sans créer des sujets de préoccupation au niveau écologique, fiscal et des libertés individuelles.

livre d’or Micèle Rauzier, Hôtel du Nord.

Mon hypothèse plus générale, est que ces calculs du dispositif touristique qui visent à rendre comparable et prévisible l’accueil, les personnes de passage et leur relation nous empêchent doublement de raisonner, c’est à dire d’entrer en résonance avec le monde au sens du sociologue Rosa Hartmunt et de faire appel à notre raison au sens de Bernard Stiegler. C’est pour reprendre des termes de Michel Callon, une relation sans relation. J’ai proposé pour conclure un nouveau concept « d’ordre touristique » afin de nommer ce que j’ai observé et analysé, c’est-à-dire ce qui met en ordre au sens de hiérarchise, donne des ordres au sens de « fait faire » et fait rentrer dans un ordre. Pour reprendre un concept proposé par Bruno Latour, le dispositif touristique est comme une boite noire, une science déjà faite qui n’est plus discutée et discutable. Si cet ordre des choses est de plus en plus une source de préoccupation pour la société, pour autant, seul ses effets sont discutés. Les touristes sont pointés du doigt comme responsables de ses effets négatifs car ils seraient trop nombreux, trop concentrés au même endroit, pas assez responsables et trop peu dépensiers. Les propositions sont de fixer des quotas, de les taxer ou de mieux les responsabiliser. Ce sont des bouc-émissaires commodes dont parle Bernard Stiegler qui amènent à s’intéresser aux seuls effets du dispositif touristique sans en questionner les causes, c’est à dire l’ordre touristique.

Ma thèse est que l’ordre touristique ne peut pas se résumer à un effet collatéral des progrès en terme de mobilité ou de l’élargissement des droits aux congés payés. Il est en soi un ordre du monde. J’ai repris le terme d’ordre touristique dans un des derniers discours de l’organisation mondiale du tourisme qui parle aussi du droit des touristes. Le touriste est devenu l’ayant droit à la mobilité de par son panier moyen. L’instauration d’un droit d’entrée à Venise couplée à un système de surveillance, le « grande fratello », au nom du tourisme durable, est le symbole de cet ordre touristique mondial qui trouve sa légitimation dans le discours touristique. Cet ordre n’est pas nouveau et existe depuis l’instauration des visas tourisme. Ce qui change est que cet ordre touristique s’inscrit maintenant dans un contexte où un milliard de personnes vont selon l’ONU être amenées à migrer de manière contrainte ou choisie à cause du changement climatique. Un rapport onusien sur les droits de l’homme publié en 2019 alerte sur le risque d’un « apartheid du climat ». L’ordre touristique porte en lui le risque de cet apartheid du climat. Le tourisme se révèle de mon point de vue, après plusieurs années d’observation participative, un angle d’analyse de la société particulièrement intéressant, et à mon avis trop négligé, notamment sur la capacité à être précurseur ou à l’avant garde comme pour le e-commerce. Il anticipe ce que pourrait être l’avenir du droit à la mobilité dans un monde bouleversé par le changement climatique.

Pour conclure, cet ordre touristique invite à lire le monde en deux dimensions, sans sa part d’incalculable. En choisissant l’approche ethnographique, j’ai justement essayé de sortir d’une lecture trop carrée et cadrée du réel. Je suis ingénieur de formation, cartésien, et j’ai pu constater dans mes engagements coopératifs la difficulté à penser ainsi la réalité en deux dimensions pour mener à bien des projets collectifs. Dans la sociologie des agencements marchands de Michel Callon, qui est lui même ingénieur, j’ai retrouvé cette logique et la limite de penser en deux dimensions. Il fait souvent référence au terrain de rugby, à la notion de cadrage tout comme Bruno Latour avec la table de calcul. C’est ce qui m’a amené à dialoguer aussi avec notamment Rosa Hartmunt et Anna Tsing pour à mon tour ne pas ignorer la part d’incalculable et d’incalculé. Plutôt que d’innover, au sens de renouveler l’existant – in-novare -, la suite de ce travaux porte sur les possibilités d’inventer l’à venir comme militant, chercheur et coopérateur à partir de ces incalculés et incalculables, sources de réconfort, d’hospitalité et de poésie.

Respirer tue

la coopérative d’habitants Hôtel du Nord est associée à la pétition « A Marseille, respirer tue » et à la manifestation du 21.10.2021 qui se tiendra à l’entrée de l’Estaque au rond point des pompiers, 

A Marseille, respirer tue 2500 personnes par an, 7 personnes par jour.

L’activité maritime et croisiériste en est en grande partie responsable … alors que des solutions existent : en finir avec le fuel très polluant par le remplacement par du Gaz Naturel Liquide (GNL) et surtout mettre en place le branchement électrique à quai.

Ces deux moyens sont actés par le port mais à des échéances trop lointaines : électrification en 2022 pour les quais à La Joliette (c’est-à-dire pour Euromed 2) après 2026 pour la forme 10 (les quartiers Nord peuvent bien attendre).

A cette pollution aérienne s’ajoute la pollution sonore créée par les moteurs qui tournent et la pollution de la rade de Marseille avec tous les effluents liquides du port qui s’écoulent directement à la mer sans dispositif ni de traitement ni de rétention.

Pour accélérer vers une activité portuaire propre, pour électrifier en priorité la forme 10 et le quai Léon Gourret (les croisiéristes), à l’initiative du collectif Respire tue et à l’appel des associations signataires, signez la pétition et venez au rassemblement jeudi 21 octobre sur l’esplanade devant Servaux  face à la Forme 10:

A partir du rapport d’AtmoSud (l’organisme chargé de la surveillance de la pollution aérienne) sur la situation factuelle de la pollution dans nos quartiers, un capitaine au long cours et le médecin président de l’association santé environnement France (ASEM), cardiologue spécialiste de ces questions, expliqueront les enjeux du problème. Des réseaux de capteurs citoyens seront également présentés.

La fédération des CIQ du 16ème et les associations du 16ème : Cap au Nord, Association Estaque Environnement, Thalasanté, Hôtel du Nord et FNE 13.

Les fours à chaux du Vallon des Tuves

La coopérative Hôtel du Nord a été créée il y a dix ans par des personnes issues de sept communautés patrimoniales des quartiers nord de Marseille. Ces communautés patrimoniales, au sens de la Convention de Faro, réunissent des personnes qui attachent de la valeur à des aspects spécifiques du patrimoine culturel qu’elles souhaitent, dans le cadre de l’action publique, maintenir et transmettre aux générations futures.

Hôtel du Nord a été depuis un outil coopératif pour de nombreuses communautés patrimoniales de la métropole marseillaise. C’est pourquoi aujourd’hui Hôtel du Nord soutient l’initiative du Comité d’Intérêt de Quartier (CIQ) des Trois Vallons concernant les fours à chaux du Vallon des Tuves. Ces fours sont un des témoignages du passé industriel de nos quartiers. Ensemble nous avons réussi à réunir des acteurs d’horizons très différents : M. Fourès de la fondation du patrimoine, Mme D’Ovidio, archéologue de la ville de Marseille, M. Delpalillo, conservateur restaurateur, Mme Van Bost, chercheur patrimoine industriel Région Sud, Kheira Miloud, maison du projet, M. Narcante, chargé d’opération de la Métropole, M. Olmos, chef de projet MRU de la Métropole, Mme Giraud de la DRAC, monuments historiques, Mme Baussan, service inventaire du patrimoine de la Région, M. Esposito de la SOLEAM, ainsi que 11 étudiants en architecture avec leurs enseignants du MAP-GAMSAU /ENSA Marseille.

L’archéologue a commenté les visites des fours à chaux, en exposant les documents d’archives regroupés, le contexte économique et local – nouvelle gare des Aygalades, canal – expliquant le fonctionnement théorique du four, son approvisionnement, les matières premières, le processus de fabrication de la chaux, invitant à la restitution du four dans son état originel, pointant les affaiblissements structurels, les transformations post activité. Des échanges ont pu ainsi avoir lieu entre les différents participants. Les rencontres successives ont ainsi permis de rencontrer des personnes en responsabilité.

Le CIQ et Hôtel du Nord continuent à rassembler les documents utiles aux informations relatives au Four à chaux, à ses propriétaires, aux utilisateurs ainsi qu’à son environnement au cours du temps. Une autre visite publique était prévue dans le cadre des Journées Européennes du Patrimoine, malheureusement annulées. Quatre étudiants travailleront sur le long terme sur ce site sur les ébauches de sujets suivantes : Julien sur le relevé du four, Charaf sur le mode de construction du four à chaux, Clothilde sur l’insertion dans le site et modélisation du four à chaux et Miruna sur le patrimoine industriel face aux enjeux de la restauration.

Pour notre part, le CIQ et Hôtel du Nord, attendons beaucoup des personnes et institutions présentes. Le nombre conséquent de participants – vingt sept – prouve l’intérêt suscité par ces fours. Nous souhaitons donc que le travail entrepris, sous des angles différents, puisse permettre aux « décideurs » de tout mettre en œuvre pour les préserver et les mettre en valeur. Ils pourraient servir à illustrer l’évolution du monde du travail pour les plus jeunes.

Nous avons été souvent choqués par la promptitude des pouvoir publics, notamment de la ville de Marseille, à détruire les traces du passé de notre ville. Ainsi en a-t-il été de l’hôpital Hôtel-Dieu transformé en hôtel de luxe, du projet de la bastide Valmer et de son parc promis au même destin et, bien sûr, la carrières antique sacrifiée aux promoteurs. Aussi sommes-nous très attentifs aux décisions de la nouvelle municipalité en matière de préservation du patrimoine.

Pour le moment ces actions n’ont pas fait bouger les positions des décideurs. En mars 2020, Hôtel du Nord avait interpellé l’ensemble des candidats à l’élection municipale sur leur responsabilité en matière de droits culturels suite à la Loi NOTRe d’août 2015, et plus particulièrement sur le patrimoine culturel au regard de la Convention de Faro (voir l’article à ce sujet). Le printemps marseillais a répondu à cette lettre en mars 2020.

Dans sa réponse, Michèle Rubirola, pour Le Printemps Marseillais, dit son attachement aux récits partagés et aux patrimoines cachés et s’engage à respecter la Convention de Faro (voir la lettre de réponse). Nous avions fait des propositions dans cette lettre qui n’ont pas eu pour le moment de suite. La situation des fours à chaux remet à l’ordre du jour ces propositions comme celle de reprendre la Mission européenne de patrimoine intégrée qui a pris fin en 2013 ou la création de commissions patrimoines qui associeraient de nouveaux les communautés patrimoniales aux choix d’urbanisme, de développement économique ou d’actions culturelles en lien avec les communautés patrimoniales concernées.

La Convention de Faro, à peine ratifiée par l’Italie, sera en juin 2021 entrée en vigueur en Europe depuis dix ans. Marseille qui a accueilli en 2013 le premier forum européen sur Faro pourrait s’associer à cet anniversaire aux côté d’autres villes. La prise en compte des fours à chaux est une occasion d’avancer dans cette voie.

Les fours à chaux du Vallon des Tuves aujourd’hui

Ce texte a été élaboré avec Patricia Gristi, présidente du CIQ et Agnès Maillard, sociétaire de la coopérative Hôtel du Nord.

L’église Saint-Louis de Marseille, une Mémoire en devenir – Parution

Nous sommes heureux d’annoncer la parution de l’ouvrage « L’église Saint-Louis de Marseille, une Mémoire en devenir » aux Éditions Maltae.

Cette aventure éditoriale commencée en 2012 a réuni autour de Jean-Claude Gautier une équipe d’historiens.nes et d’historiens.nes de l’art pour raconter les histoires de ce chef-d’œuvre de l’architecture religieuse du XXe siècle érigé en 1935 dans un quartier populaire du 15e arrondissement de Marseille. Sous la direction de Jean-Claude Gautier, sociétaire de la coopérative Hôtel du Nord, une équipe pluridisciplinaire a entrepris la réalisation d’un ouvrage centré sur la période d’avant-guerre pour mettre en lumière les richesses de cette église en n’omettant pas le contexte religieux et économique de cette époque .

Sous l’épiscopat de Mgr Dubourg (1928-1936), l’abbé Gabriel Pourtal initie le projet qui   remplace l’ancienne église. Il sollicite l’architecte Jean-Louis Sourdeau (1889-1976), auteur de l’église Notre Dame de rocquigny (1929-1932) pour concevoir ce chef d’œuvre du patrimoine architectural marseillais encore méconnu dont la structure et la voûte sont réalisées en béton armé selon les procédés Hennebique.

Cette église, réalisée entre 1933 et 1935, s’inscrit dans un projet de rechristianisation d’un quartier fortement industrialisé à la population étrangère importante. Cette volonté de reconquête des fidèles passe par cette imposante réalisation architecturale où prend un ensemble iconographique extérieur et intérieur conséquent : un Christ crucifié, des anges adorateurs et un archange Gabriel monumentaux de Carlo Sarrabezolles, un bas-relief de Sainte-Fortunée de Louis Botinelly, un Chemin de croix de   Jac Martin-Ferrières, des pavés de verre comme vitraux autour du roi Saint Louis et un luminaire en forme de couronne d’épines. L’association la Fraternité Saint-Louis a été créée en 2004 pour la défense et la sauvegarde de l’église et de ce patrimoine.

Après-guerre, deux affiches monumentales ont été installées de part et d’autre du chœur et entre 2000 et 2013, les deux seules œuvres religieuses de Vasarely et de son fils Yvaral (le Christ et Saint-Pierre) y ont séjourné de 2000 à 2013 et plus près de nous une peinture de la Sainte Trinité de Maria del Carmen Villaveces.

Textes : Claude Massu, Christine Breton, Samia Chabani, Anaëlle Chauvet, Marina Sanchez,(Association Ancrages) Sophie Audibert, Robert Maumet, Eve Roy, Laurent Noet, Christine Blanchet, Georges Tortel, Jean-Claude Gautier, Laure Van Ysendyck.

Photos :  Patrick Box, Léopold Farfantoli, Pierre-Michel Gautier, Xavier de Jauréguiberry, Olivier Liardet, Florence Portemer

Format : 128 pages, plus de 110 illustrations dont certaines inédites, format 21×28 cm. 25 euros TTC

L’ouvrage est disponible dans le réseau de chambres patrimoniales de la coopérative d’habitants Hôtel du Nord.

Présentation de l’ouvrage par Jean Claude Gautier.

Les cheminées des collines, entre pastoralisme et toxic tour

Réalisation par Guillaume Baudoin / Production Hôtel du Nord et l’association environnement Septèmes-les-Vallons et environs – AESE.

Chaque année la coopérative Hôtel du Nord propose de construire à plusieurs, sous le nom collectif du Mille pattes, de nouvelles balades avec ceux qui en ont envie, voisins d’à côté ou d’un peu plus loin.

Ce film restitue de manière sensible une balade construite collectivement à Septèmes-les-Vallons autour des enjeux écologiques d’un territoire partagé entre activités industrielles, péri-urbanisation de Marseille et préservation des milieux naturels.

Textes écrits par les habitants, balade filmée le 16 novembre 2019. Avec Pierre de l’association Septèmes-les-Vallons patrimoine, Isabelle, Anne-Marie, Henri et Bernard de l’AESE, Malika, Agnès, Carole, Georges, Julie, Dominique, Stéphanie, Claire, Agnès, Louis, Virginie, Nathalie et Eric de la Ferme communale de Septèmes-les-Vallons. Merci à Sylvie pour les Fantaisies tricotées de Tata Patchouli, au Bureau des guides du GR2013 et à tous ceux qui sont venus participer ou contribuer à nos recherches. Merci à Guillaume pour ce film. Merci aux cheminées, aux chèvres, au ruisseau, aux pierres et aux herbes folles des collines.

Cher.e.s candidat.e.s

Cher.e.s candidat.e.s

Le programme Archives Invisibles de la biennale Manifesta propose d’ici novembre huit expositions autour d’archives collectées et issues de la collaboration entre artistes et structures citoyennes de quartiers de Marseille afin de refléter la richesse et la multiplicité des récits non-officiels qui construisent la ville. Notre coopérative d’habitants Hôtel du Nord partage jusqu’au 21 mars ses archives invisibles, collectées et racontées en lien étroit avec l’artiste marocain Mohamed Fariji. 

Depuis le 8 août 2015, la Loi NOTRe (Nouvelle Organisation des Territoires de la République) veut que sur chaque territoire, les droits culturels des citoyens soient garantis par l’exercice conjoint de la compétence en matière de culture par l’État et les collectivités territoriales. La « Convention de Faro » du Conseil de l’Europe précise ces droits en matière de patrimoine culturel. Cette responsabilité sera peut être bientôt la vôtre.

Nos demandes sont simples. Comment allez-vous assumer cette nouvelle responsabilité en matière de droit au patrimoine? Connaissez-vous le texte de la Convention de Faro?

Si vous venez visiter nos archives d’ici le 21 mars, vous pourrez découvrir comment ces droits sont interprétés et appliqués à  Marseille. Concernant votre programme, allez-vous reprendre la Mission européenne de patrimoine intégrée (Ville-Etat-Conseil de l’Europe)qui a pris fin en 2013? Allez-vous adopter les principes de la Convention de Faro comme d’autres maires ici avant vous? Allez-vous faire vôtres les recommandations de la Région Nouvelle Aquitaine en matière de droits culturels? 

Au delà de l’aspect légal, ne pensez-vous pas qu’il est temps que Marseille retrace les généalogies et les mémoires non institutionnelles d’initiatives d’habitants, d’histoires de résilience et de synergies collectives ? Des généalogies qui remettent en question les discours « traditionnels » de la ville et appellent à leur reconnaissance, ce patrimoine commun, aujourd’hui souvent invisible et inaperçu des institutions.

Nous vous adressons ces demandes comme à d’autres candidats. Votre réponse sera publiée sur notre site et entrera dans nos archives, visibles jusqu’au 21 mars au Tiers QG. Nous nous tenons à votre disposition si vous souhaitiez vous y rendre.

Dans l’attente d’une réponse de votre part, nous vous prions d’agréer l’expression de nos salutations coopératives.

Pour la coopérative Hôtel du Nord, Prosper Wanner (sociétaire, gérant), membre et animateur du Réseau européen de la Convention de Faro.

Réponses arrivées :

  • Lettre Printemps Marseillais (10 mars)

Documents à télécharger :